TOURISME La station jet-set promeut un tourisme de nature et de détente. Mais le vrai luxe est ailleurs.
“Come up, slow down”, tel est le slogan de l’office du tourisme de Gstaad, village alpin posté dans une plaine idyllique entouré de montagnes, principalement connu pour les célébrités qui y résident, y passent des vacances, y échappent au fisc ou encore y attendent d’être extradées aux USA. Inventé en 2000, ce slogan se veut représentatif de la philosophie de la station, à savoir l’évasion de la vie urbaine, le ralentissement du rythme du travail. “Si t’en as marre de tout ça, monte au village et détends-toi”, traduit Reto Tschannen, manager du marketing à l’office du tourisme de Gstaad. “Ici, on peut souffler, se détendre” ajoute sa collègue Kerstin Sonnekalb, manager des relations publique. “Come up, slow down” a pour ambition de compléter l’image jet-set de la station et met en avant “les mille possibilités touristiques qu’offre la région, ainsi qu’une très grande qualité de prestation au niveau du service, de la cuisine, de l’hébergement et de l’information”, énumère Kirsten Sonnekalb, les étoiles dans les yeux, et le slogan brodé sur la blouse.
“Gstaad est l’antithèse du slow down”
A la vue des nombreuses bijouteries, boutiques de fourrures et de montres qui incitent à la consommation, on se demandent tout de même comment le “slow down” s’applique au shopping. Contradiction? Kerstin Sonnekalb en donne une explication limpide: “On peut faire des achats un peu plus lentement”. Certains dépensent tout de même un peu moins, comme Monique, touriste française, qui ne se relaxe pas tout à fait: “Rien que boire un verre à une terrasse me tend, tellement c’est cher”.
“Come up, slow down? C’est un joke!” s’exclame Elisabeth Aubert Schlumberger, la réalisatrice du film documentaire “L’autre versant de Gstaad” sorti dans les salles de cinéma romandes il y a deux semaines. “A Nöel ou en février, Gstaad est l’antithèse du “slow down”, c’est l’effervescence, le délire: on ne peut plus passer en voiture tellement il y a du monde, les restaurants sont bondés. Les gens viennent se montrer, sortir dans des soirées mondaines, se croiser entre eux. Ces dernières années, des gens extrêmement fortunés achètent de très grands chalets qu’ils n’habitent que quelques semaines par an, ils n’ont pas le temps de profiter”, explique la réalisatrice, déplorant le manque d’intérêt de ces derniers pour la région.
Le luxe est dans le pré
L’été pourtant, une faune différente monte à Gstaad. Plus familiale, moins mondaine, bien que toujours très bourgeoise. Pour séduire ces touristes estivaux, l’office du tourisme prône “l’authenticité des traditions” et vante fièrement les “quatre-vingt paysans de la région et les cent cinquante alpages”. De nouveaux bed&breakfast à la saveur du foin voient le jour.
Les Sumi, paysans bio, ont investi leur grande ferme de Feutersoey, un village à 10 minutes en BMW de Gstaad, en maison d’hôte. “On voulait proposer aux gens une alternative au luxe”, explique Daniela Sumi. “On reçoit des jeunes couples, des retraités, des gens qui font attention à leur budget mais surtout des gens aisés qui recherchent autre chose” renchérit son mari Walter. Des Suisses, des Français et des Allemands dorment dans les 16 lits, répartis dans des chambres doubles ou à 4. Dans la salle commune, les gens mangent les röstis maison du petit-dèj compris dans les 56 francs que coûte la nuitée par personne.
Paysans avant d’être hôtes, Les Sumi ont beaucoup à faire dans les champs, surtout l’été. Mais leurs hôtes raffolent de ce nouveau type d’hébergement et ne se lassent pas de poser des questions sur la vie paysanne, follement exotique à leurs yeux.
L’authenticité paysanne représente donc le nouveau chic à Gstaad. Les mauvaises langues crachent sur la station de Zermatt, où “ils font passer les chèvres exprès au milieu du village pour les montrer aux touristes”, révèle un villageois. Certes. Mais une question subsiste: si les traditions sont intactes, pourquoi diable les paysans de la région reçoivent-ils de l’argent de la commune pour décorer leur vaches de fleurs à la désalpe?
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