La Religion au secours de la crise
Prêtre depuis à peine trois mois dans la paroisse de Delémont, l’Abbé Gindrat nous confie son sentiment sur la crise politique et financière que traverse nos sociétés. Il nous parle également de sa relation avec Dieu et des émeutes de Londres. Entretien.
Delémont. C’est dans le chef-lieu catholique du canton du Jura que François-Xavier Gindrat exerce son ministère. À 28 ans, cet abbé originaire de Porrentruy dépoussière l’image quelque peu vieillotteque l’on peut se faire d’un clerc. De passage à la sacristie pour chercher ses habits sacerdotaux, il s’exprime gaiement avec son accent jurassien : « Si tu prends le cœur de l’évangile, Dieu nous donne son pardon et la force d’aller de l’avant. Il n’y a rien de plus actuel ». Pour ce jeune Abbé, la société du XXIème siècle qui traverse une grave crise sociale aurait beaucoup à gagner d’un retour aux valeurs chrétiennes.
La crise : un tremplin ? Sur le chemin qui le conduit à la messe, vêtu d’une chemise bleu ciel à col romain, le jeune prêtre rend les salutations aux passants qui le reconnaissent dans la rue. Installé depuis une année à Delémont, les habitants de la ville ont rapidement appris à reconnaître la silhouette élancée du nouveau prêtre. En cette matinée brumeuse, de retour à son bureau, il évoque ces temps de crise qui selon lui pourraient déboucher sur une prise de conscience collective. « Les gens se rendent compte qu’une vie uniquement basée sur l’attrait matériel n’est pas souhaitable à long terme. L’être humain a besoin de nourriture spirituelle ». En évoquant les émeutes qui se sont déroulées à Londres, l’Abbé Gindrat s’exclame d’une voix assurée : « Si tu n’es pas bien dans tes pompes, tu vas pas casser des vitrines ». Le jeune prêtre souligne également que la précarité sociale, le chômage notamment, est une des raisons principales qui poussent au mécontentement. La religion serait-elle une solution ? L’Abbé Gindrat ne fait que témoigner de ce que Dieu et la foi lui apporte en essayant de transmettre cette relation aux autres. S’il évite de se placer en donneur de leçon, il reste cependant convaincu qu’ « en suivant l’exemple de la Bible, les gens seraient amenés à se rencontrer plutôt qu’à s’étriper ». Pour le jeune prêtre, l’Eglise reste garante de l’ordre moral et témoin d’une espérance. En se référant aux événements de Mai 68, il voit la preuve que nos sociétés, pour fonctionner, ne peuvent faire l’économie de certaines valeurs comme la famille et respect de la vie.
Pas des illuminés. La jeunesse est-elle déconnectée de la religion ? « Non, répond l’Abbé avant d’ajouter qu’en discutant avec des jeunes on s’aperçoit que la spiritualité est une chose qui les questionne ». Eduqué dans une famille catholique pratiquante, c’est à l’adolescence, vers 16 ans, que François-Xavier a décidé de servir Dieu. Il se rappelle tout particulièrement d’une rencontre avec un prêtre. « En le voyant, il m’est apparu heureux, comblé. Je me suis dit que ce à quoi il avait consacré sa vie devait valoir la peine ». Dix ans plus tard, il recevait le sacrement de l’ordre des mains de l’évêque de Bâle, autorité suprême du diocèse de Bâle dont fait partie le canton de Jura. Dans le petit salon de la cure catholique, assis de façon décontractée sur un fauteuil en tissu, l’Abbé en dit un peu plus sur sa foi. « On n’est pas des illuminés, des tarés. Comme tout le monde, on se remet en question. Le doute fait partie intégrante du jeu». Pour appuyer ses dires, il prend l’exemple de la Bible. Si on la lit, on observe que Dieu est sans cesse trahi par des hommes qui doutent mais que Dieu ne les abandonne pas pour autant. En poursuivant sur le thème des Ecritures, il précise qu’il ne faut pas les comprendre au pied de la lettre. « Nous ne sommes pas créationnistes. L’Eglise tente de répondre au « pourquoi de la vie » alors que les scientifiques s’attachent au comment. L’intégrisme mélange les deux ». Le prêtre rappelle qu’en définitive le plus important est de ne pas perdre de vue le projet général des Ecritures, à savoir le pardon et l’amour que Dieu nous donne et que nous sommes invités à nous donner les uns les autres.
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